Submitted Abstract
Sous le titre générique « L’Histoire, c’est aussi nous » Mutations 4 issu d’une journée d’études soutenue par le FNR propose une réflexion sur les racines historiques de l’engagement citoyen des étrangers au Luxembourg. L’ouvrage se situe dans le contexte général d’initiatives régionales et internationales qui signalent depuis peu un regain d’intérêt pour l’histoire sociale. La question migratoire aiguise désormais ce regard nouveau porté sur le passé des ouvriers, des salariés ou des couches populaires. En choisissant d’aborder le sujet selon une ligne de partage « ethnique » ou « juridique », « étrangers » d’un côté, « Luxembourgeois » de l’autre nous souhaitons intégrer dans notre réflexion la notion d’intersectionalité : un ouvrier étranger n’est pas seulement discriminé parce qu’il est ouvrier, mais encore en sa qualité d’étranger. Il peut de ce fait tout à fait juger dans son intérêt stratégique de s’allier à un autre étranger, serait-il indépendant, voir patron. Les actes s’articulent selon trois axes :1)Héritages et bagagesCette partie revient sur les formes d’auto-organisation mises en place par les étrangers du Luxembourg et plus particulièrement les Italiens au début du XXe siècle à travers les sociétés de secours mutuel. C. Grandi. Son texte, dont la lecture demande concentration montre comment même un engagement mutualiste qui opère selon des lignes de partage nationales devient pour l’étranger un moyen de dépasser sa condition mineure. L’engagement mutualiste n’a pas échappé à l’attention des observateurs luxembourgeois, puisque le chansonnier P(o)utty Stein lui consacre un clin d’œil amusé dans la chanson « Clivio-Giorgetti » analysée par M. L. Caldognetto et A. Reuter Antoinette Reuter essaie de montrer comment la communauté française est prise dans les rets d’une mémoire régionale. Ses œuvres de secours offrent la spécificité de se construire autour du souvenir prégnant de la perte de l’Alsace-Lorraine. 2)Nouveaux défis nouvelles réponsesDepuis l’affirmation des Etats-nations en Europe et pour certains d’entre eux leur lente évolution vers l’Etat-providence avec des les enjeux nationaux constituent également la clé de la redistribution de la manne sociale. D. Scuto relate comment des mesures anti-allemandes prises au lendemain de la Première Guerre mondiale sous l’influence éventuelle de milieux français privent progressivement les ouvriers étrangers en général de la participation aux représentations ouvrières. M. L. Caldognetto montre à travers la trajectoire transnationale de la militante Rosa Cremoni comment la vie individuelle d’une personne est inscrite dans les combats d’une époque. La contribution de C. Venza évoque la géographie anarchiste italienne dont on retrouve les traces matérielles parmi les immigrés italiens du Luxembourg. 3)Entre pavés et prétoires L’immédiat après 2e Guerre mondiale se caractérise par l’émergence un sentiment identitaire luxembourgeois qui n’est guère clément aux étrangers, fussent-ils résistants. S. Kovacs essaie de fournir des éléments qui permettent d’évaluer, sur fond de nationalisme exacerbé, la position délicate du parti communiste luxembourgeois. M. L. Antenucci nous fait découvrir l’évolution parallèle en Lorraine. A. Thoma s’intéresse à travers un ensemble de sources inédites ou peu exploitées jusqu’à présent à la place des étrangers dans la mosaïque syndicale de l’après 2e Guerre mondiale. La contribution de G. Thoma met en avant, le rôle des institutions européennes dans la définition des droits des étrangers.La communication de P. Corti montre à l’exemple de l’Italie le jeu subtil entre représentation de l’émigration et de l’immigration.